jueves, 22 de diciembre de 2011

Café proustiano y otros pudores / Café proustien et autres pudeurs

Ilustración: Louise Pressager







Café proustiano y otros pudores

El botón de pause parpadea incesantemente en tu cabeza. La tragedia está en modo reposo, pero sabes que en algún momento tendrás que darle al play y ¡blaaaaaam! abrir la caja de pandora.
Ahora no, por favor, todavía no. 
Sigues presionando el botón de pause con el dedo meñique del pie izquierdo, mientras te entrenas haciendo equilibrios por encima del hilo del estrés cotidiano. Ahora no te lo puedes permitir. Bueno, sí, seguro que sí, pero no quieres. Porque es viernes y los viernes hay fiesta después del trabajo y sabes que el chico nuevo, el que se sienta al otro lado del despacho, lleva esperando toda la semana para invitarte a una cerveza, charlar contigo y, si se tercia, bailar un poco e incluso, por qué no, llevarte después a casa para echar un buen polvo. Bueno, echarte. Porque en estos momentos hasta un simio autista con un severo retraso mental podría percibir que cada vez que ríes estás haciendo malabares circenses y piruetas de tripe salto mortal para no romper a llorar. Porque no quieres llorar. 
Ahora no, por favor, todavía no. 
Necesito aguantar un poco más. Hasta la hora de la pausa en la oficina. Hasta que pida un café y todas las señales que he evitado escuchar hasta ahora se me vengan encima. Sí, un café. Solo. Sin azúcar. El café era de nosécuálpaísenvíasdedesarrollo y olía exactamente como el que tú me preparabas los viernes por la tarde cuando después del trabajo no había ni fiestas ni citas ni polvos pero tú, y todo lo demás estaba de sobra. Pues sí, ha sido el café proustiano, y no tus gritos telepáticos ni mi amor transfronterizo, el que me ha abatido sobre la mesa del bar. Literalmente. He tenido que recoger mis vísceras en ramo y remolcarlas hasta un lugar seguro donde poder desangrarlas en silencio. He urgado mi tristeza más preciada y te la he dedicado. He desgajado mi piel a tiras hasta exprimirme el alma. Por fin, he empezado a sollozar. A Llorar. Por todo lo que he ignorado hasta ahora llorar hasta dolerme llorar hasta embarazar mis párpados y ojeras llorar hasta el abismo de la afonía llorar hasta tiritarde frío llorar hasta vaciarme de nostalgia llorar hasta vomitar todos los gemidos del lamento llorar hasta secarme por dentro llorar. Por ti. Por las dos. Por el mundo entero.
Y cuando el frío ha empezado a abrasarme las entrañas las he amasado, las he limpiado, las he puesto a secar al sol y las he guardado entre mis piernas bien calientes. Me he dado una ducha de pudor, me he vestido y heacudido al trabajo vestida de rojo. Esta mañana, a la hora de la pausa, he pedido un zumo de naranja. Natural. Sabes¿? Creo que voy a decirle que sí, al chico de la oficina, sólo por distraerme, por ir a tomar algo. Sí, puede que le diga que sí y que hasta salga bien y  en lugar de una cerveza me tome dos o tres, no más porque sino luego no puedo andar en línea recta, ya me conoces, y entonces a lo mejor nos vamos a bailar y acabamos en su casa arrancándonos la ropa con los dientes y a la mañana siguiente, quizás no sea raro, quizás me llame a los tres días (conoces la regla de los tres días, no¿? claro que la conoces, no eres ni tan rara¡!) para ir a cenar o al cine, sólos los dos, y entonces empezaremos a salir un par de semanas. Si me gusta, y no dice muchas tonterías después de follar, a lo mejor hasta se lo presento a mis padres para ver si a ellos también les gusta y le presionan lo suficiente para que entienda que ya voy estando en edad de merecer y me compre un vestido blanco y largo hasta los pies para llevarme a un bonito altar donde juraremos querernos en lo bueno y en lo malo; y lo buena será que nos compraremos una casa en las afueras, porque ya no soporto el ruido de esta ciudad y el aire fresco me sentará bien, y tendremos un jardín con columpios para los niños y, por qué no, un perro, de talla pequeña, eso sí, para que pueda correr a gusto por el césped, y lo malo será que no podré hacer realidad todos sus sueños porque yo en realidad lo que de verdad quiero es sufrir un poco más. Por ti. Por las dos. Por el mundo entero. 
Pero ahora no, por favor, todavía no. 

Disculpa cielo, pero nadie sobrevive al desgarro constante. 



Café proustien et autres pudeurs

Le bouton de pause clignote en permanence dans ta tête. La tragédie est en mode veille, mais tu sais déjà qu'un jour tu devras appuyer sur play et  blaaaaaam! ouvrir la boîte de Pandore. 
Pas maintenant, s'il te plaît, pas encore.
Toujours en appuyant sur le bouton de pause avec l'petit orteil de ton pied gauche, tu continues à faire des acrobaties sur le bout d'fil du rythme habituel du stress quotidien. Maintenant, tu ne peux pas te le permettre. Enfin, bon, ouais, tu pourrais, c'est sûr, mais tu ne veux pas, bref. C'est vendredi, les vendredi on s'éclate après le boulot et, tu sais, il y a ce nouveau mec de l'agence, oui, le nouveau stagiaire qui s'assoit à l'autre bout du bureau, bah, ça fait toute la semaine qu'il attend pour te demander d'aller boire un coup, et toi, toi tu crèves d'envie de lui dire "si", et puis, ça se trouve après vous pourriez aller danser un peu et pourquoi pas bouger chez lui pour finir complètement bourrés avant de s'éclater au pieu. Te faire éclater, plutôt, car même un singe autiste sévèrement attardé pourrait bien se rendre compte que chaque sourire que tu offres est un nouveau tour de jonglerie et que t'es obligée de faire des pirouettes de triple saut mortel pour ne pas éclater en sanglots. Par ce que. Je ne veux pas pleurer. 
Pas maintenant, s'il te plaît, pas encore.
Je peux encore tenir un peu. Jusqu'au moment de la pause au bureau. Jusqu'à ce que j'eusse commandé mon café au bar du coin. Et là, exactement, tous les échos dont j'avais eu la détresse d'éviter me tomberont dessus. Oui, un café. NoirSans sucre. 
Un café de jenesaispasquelpaysenvoiededéveloppement qui sentait exactement comme celui que tu me préparais chaque vendredi soir quand, après le taf, il n'y avait ni fête ni rencontres ni sexe mais toi, et tout le reste était en trop. Eh ben oui, il s'avère que c'est le café proustien, et pas tes agonies  télépathiques ni mon amour transfrontalier, qui m'a abattu direct sur le comptoir du bar. Littéralement. J'ai du recueillir mes tripes dans un bouquet et les remorquer jusqu'à un endroit plus sûr pour qu'elles saignent en silence. J'ai creusé ma tristesse la plus précieuse et je te l'ai consacré. Je me suis déchiré la peau en bandes pour arriver à presser mon âme. Écorchée vif. Enfin, j'ai commencé à sangloter. Pleurer. Pour tout ce que j'avais ignoré jusqu'à présent pleurer jusqu'à me blesser pleurer jusqu'à féconder cernes et paupières pleurer jusqu'à l'abîme de l'aphonie pleurer jusqu'au tremblement jusqu'à grelotter de douleur pleurer jusqu'à vomir tout le malheur pleurer jusqu'à dessécher mes entrailles. Pour toi. Pour nous deux. Pour tout le monde entier. 
Quand le froid a commencé à brûler mes tripes, les ayant pétries, amassées, les ayant nettoyées et mises au chaud du soleil du moi de mars, je les ai à nouveau gardées entre mes cuisses molles. J'ai prise une douche de pudeur froid(e), je me suis rhabillé et rentré à l'agence habillé en rouge. Ce matin, au moment de la pause, j'ai juste commandé un jus d'orange. Naturel. Tu sais? J'ai réfléchi ces derniers temps. Je vais peut-être lui accorder une chance au type du bureau, ça me fera du bien de prendre l'air un peu. Oui, je vais lui dire que oui, et c'est pas exclu qu'au lieu d'une on prenne deux ou trois bières, pas plus, tu sais que sinon après je ne retrouve plus mes pieds, moi, et ensuite nous pourrions danser un peu et finir chez lui, cette fois-ci en s'arrachant les vêtements à coups de dents, et le lendemain matin sera tout à fait normal, je me blottirai contre lui dans lit avant de partir, et alors j'attendrai qu'il me rappelle pendant trois jours (tu connais, toi, la règle des trois jours non? bah oui, tu la connais, c'est sûr, t'es comme même pas si bizarre!) pour aller dîner ou voir un film, tout les deux, et puis alors on se mettra ensemble quelques semaines je ne sais pas. Après, s'il continue à me plaire et qu'il ne dit pas trop des conneries après avoir baisé, peut-être je le présenterai devant mes parents et s'ils l'aiment aussi, ils pourront lui faire remarquer que je suis digne de l'âge çafaitdéjàlongtemps et comme ça il m'achètera une belle robe blanche jusqu'aux pieds pour me conduire devant un autel solennel où on prêtera serment de notre amour pour le meilleur et pour le pire; le meilleur étant qu'on trouve une maison en banlieue, car ça m'écœure le bruit du centre ville, avec un jardin et des balançoires pour les gamins, deux, une fille et un garçon, et pourquoi pas un chien, de petite taille, pour qu'il puisse courir à son gré, et le pire étant que je ne serai  jamais en mesure de réaliser ses rêves car  moi, ce que je veux vraiment, moi maintenant, c'est pouvoir souffrir encore un peu. Pour toi. Pour nous deux. Pour tout le monde entier. 
Mais pas maintenant, s'il te plaît, pas encore.


Désolée, mon ange, mais personne ne survit à la déchirure perpétuelle. 

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